El pasado 22 de Enero tuvo lugar en Aviñón (Francia) un encuentro auspiciado por la asociación Contraluz para tratar de elucidar (en la medida en que ello sea posible) el problema que, alrededor de la independencia de Cataluña, se ha planteado en todos los ámbitos de la vida del Principado. El debate, que tuvo lugar en el salón principal del Ayuntamiento de esa hermosa ciudad francesa, fue moderado por el profesor de la Universidad de Aix-en-Provence, Bernard Bessière, especialista en Historia Contemporánea de España. Como ponentes de posturas opuestas, que no enfrentadas, acudimos a la cita el profesor de la Universidad Pompeu Fabra de Barcelona, Jaume López Hernández, y yo mismo, como escritor reconocido y antiguo militante de causas más que perdidas. La controversia, larga y muy animada por parte de un público numeroso, se prolongó a lo largo de dos horas y media. Dos horas largas, durante las cuales, pudimos exponer cada una de las visiones y puntos de vista abordados. Al final del mismo, todos convinimos en que debates como éste son más necesarios que nunca en un escenario tan caldeado como lo es ahora el de Cataluña. Entre otras razones porque la distensión, el diálogo entre posiciones razonadas y diferentes, así como un clima de serenidad y calma en la expresión de posturas muy distintas, serán las únicas vías que permitan, en un futuro no demasiado lejano, hallar un acuerdo desde el consenso, el reconocimiento y la confianza mutuas.
En esta entrada de Text&Context doy el texto que escribí como base para mostrar mi punto de vista. Escrito en francés, decido publicarlo en dicha lengua sin traducción alguna. Quien quiera difundirlo podrá hacerlo de acuerdo con su particular estilo de transcripción directa.
♣
CATALOGNE/ESPAGNE : UNE RENCONTRE IMPOSSIBLE ?
si he perdido la voz en la maleza
me queda la palabra
Si j’ai perdu la voix dans le désert
Il me reste la parole
Blas de Otero
La question qui nous réunis ici, aujourd’hui, est de savoir si la Catalogne, en accord avec les lois de la Constitution espagnole et même de la Constitution de l’Union Européenne, peut obtenir son indépendance sans accomplir une rupture traumatisante pour l’Espagne et pour le reste de l’Europe.
Pour le mouvement d’émancipation nationale qui, depuis sept ans, lutte ouvertement pour se débarrasser de la tutelle de l’État central, l’Espagne actuelle est un pays tombé dans la corruption et l’autoritarisme et qui a une dette si monstrueuse auprès de la banque internationale que personne ne pourra la payer. C’est, aussi, un gouvernement complètement fermé à toute réforme de la constitution qui, en 1978, a ouvert la période la plus féconde de la démocratie en Espagne, malgré ses limites imposés par la dictature.
La dictature. Voici l’ombre du passé qui pèse, comme une épée de Damoclès, sur la démocratie en Espagne. Pour les indépendantistes (et pour une nouvelle gauche qui n’a pas compris les conditions dans lesquelles s’est développé la lutte pour la liberté) l’ensemble de l’appareil de l’état actuel, héritier direct du franquisme avec la monarchie, empêche toute évolution vers un système plus démocratique et autogestionnaire. L’autonomie, donc, est un système inefficace à l’heure actuelle.
Une bourgeoisie très dynamique et aussi un secteur très important de la population catalane essayent de s’écarter du reste du territoire espagnol pour commencer, avec la république, un nouveau voyage vers une Catalogne indépendante capable de garantir un Etat-Providence performant/efficace et une compétitivité économique très puissante en Europe. Bref, une sorte de nouvelle Hollande du sud.
Le problème pour cet important secteur de la population est, on le voit bien, qu’il n’a pas la majorité nécessaire de son coté ni la loi. Cette opération politique, pleine de dangers et de pièges, exige un projet très bien conçu et un pourcentage indéniable qui, pour atteindre son objectif, devrait se situer entre 75 et 80 pour cent. Et c‘est ne pas le cas.
Devant l’absence d’un projet capable d’engager la plupart des citoyens, l’indépendantisme catalan mobilise le sentiment d’identité nationale, les nombreuses humiliations du gouvernement central et le ras-le-bol des gens qui ne trouvent pas d’issue à une crise générale qui dure depuis dix ans.
À son tour, la droite espagnole, qui a dans les mains le gouvernement de la nation, profite de cette situation pour se renfermer sur ses postulats: l’unité à n’importe quel prix, l’application de la loi (plus ou moins sévère selon la corrélation des forces), la violence de l’État avec ses mécanismes de répression… et aucune réforme de la Constitution. En fait, un cul-de-sac. Voilà le résultat auquel nous ont menés ces deux nationalismes qui s’ignorent et qui deviennent de plus en plus agressifs dans leur lutte stérile. Stérile parce que les idéologies qui soutiennent leur combat déclenchent une politique néolibérale qui attaque frontalement les acquis sociaux.
La question, donc, se pose immédiatement : et la gauche, que fait-elle au milieu de cette confusion ? La gauche, ou plutôt ce qui reste du naufrage historique des forces de progrès, est divisée comme jamais sur ce sujet. Un secteur très important de l’arc parlementaire voit dans la crise catalane, la possibilité de changer tout en Espagne, et, en conséquence, donne tout son appui aux nationalistes ; une autre partie de la gauche condamne cette politique. Elle reste fidèle aux principes de la Constitution de 1978, mais affirme très solennellement être prête à réformer le texte fondamental, fondateur, de la démocratie. La réalité est que personne ne fait rien, absolument rien, et que la situation risque de gangréner la vie de tous les Espagnols. On attend, comme d’habitude, une réponse ou, mieux encore, une solution qui viendrait de l’Europe. Mais l’Europe, qui a connu la guerre et la dévastation à cause du nationalisme, reste silencieuse sur le fond de la question et dit, tout simplement, que l’État-nation est indivisible.
Que faire dans ce contexte ? Que faire quand la voix se perd dans des discussions banales et quand la parole tombe dans la futilité et l’insignifiance ? Est-il possible de retrouver toute la puissance d’un discours politique capable d’engager les citoyens vers un horizon praticable ?
Peut-être le moment est-il arrivé de regarder en arrière, vers le passé, et de découvrir, dans le fleuve de l’histoire, la pensée la plus féconde de nos ancêtres. La pensée du fédéralisme qui, en Espagne, a eu un représentant éclairé : Pi i Margall. Avec lui, par exemple, il est possible d’élaborer une solution fédérale dans le cadre de la république. Une troisième république, donc, capable de satisfaire les revendications territoriales tout en préservant les acquis sociaux comme la conquête la plus importante de notre temps. Pour atteindre cet objectif, toutes les forces de progrès doivent travailler ensemble, au-delà de tout nationalisme, sans exclure personne, et construire l’Union Fédérale Ibérique, dans laquelle, bien sûr, les Portugais sont appelés à jouer un rôle prépondérant.
Un rêve ? C’est possible. Mais un jour, peut-être pas si lointaine, on pourrait voir Lisbonne devenir la capitale de cette confédération au sein d’une Europe qui aura redéfini son projet comme une aspiration éminemment sociale et comme une promesse de justice universelle pour le reste du monde.
José Enrique Martínez Lapuente
Barcelone, le 21 de janvier de 2018